Ile-de-France : l'Etat présente ses modalités d'intervention dans les sites à fort potentiel de développement
Le Grand Paris des Transports intègre tous les projets de ligne nouvelle. Y compris la gare terminus du Charles-de-Gaulle Roissy Express à la Chapelle, où l'Etat ambitionne de construire "l'équivalent de la gare de Saint-Pancras à Londres". Ce sera un projet aérien - et non enfoui comme le souhaitait initialement la Ville de Paris - et qui fera l'objet d'un grand concours d'architecture. Les financements seront appuyés par la BEI dans le cadre du plan Juncker : "c'est parti", a expliqué le Premier ministre. En revanche, concernant l'extension d'Eole, si Etat et Région sont parvenus à un accord, la part des départements des Yvelines, des Hauts-de-Seine et de Paris n'est pas encore fixée.
L'Etat identifie 20 secteurs prioritaires de projet, et fait fortement évoluer ses outils d'intervention. De plus, pour répondre aux problèmes d'engagement concret des opérations, des dispositifs nouveaux, financiers et réglementaires, sont ou seront mis en place.
Ce qui frappe, cependant, c'est la modulation des outils en fonction des situations territoriales : en particulier du degré d'accord des élus. A Aulnay, avec l'accord du maire, on parle d'OIN. A Champigny, où le maire est réticent, on discute d'un contrat d'intérêt national, qui verra l'Etat apporter sa contribution. On est loin des craintes de l'application uniforme et systématique d'un modèle unique : des OIN partout, accompagnées d'un opérateur unique que serait Grand Paris Aménagement. Les situations seront plus variées, a affirmé le Premier ministre.
Les rapports avec les élus seront formalisés par des Contrats d'intérêt national dans tous les secteurs à enjeux national pour l'Etat - une formule qu'avait préconisée Thierry Lajoie, dont le rapport de préfiguration de Grand Paris Aménagement (GPA) était en fait une proposition d'un nouveau modèle pour l'aménagement. De facto, on peut relever que son rapport a fortement influencé les décisions qui ont été prises.
Parmi les obstacles pointés par le rapport de Thierry Lajoie - et relevés par l'ensemble des acteurs de terrains : la difficulté à financer les infrastructures primaires dans les opérations d'aménagement, à maîtriser le foncier, à financer la remise en état de terrains avec démolition ou dépollution, puis de financer les équipements nécessaires.
Le Premier ministre a validé toute une série de dispositions qui répondent à ces interrogations :
- la refonte des prêts Gaïa de la Caisse des Dépôts pour les ouvrir dès janvier 2016 aux secteurs d'aménagement en OIN et contrats d'intérêt national. "C'est peut-être la mesure la plus importante du comité interministériel", a commenté le préfet de région après l'intervention de Manuel Valls. Le chanp de ces prêts couvrira désormais les opérations d'aménagement opérationnel, de financement d'infrastructures primaiures ou d'équipements, et pourront être souscrits par des aménageurs. "Leur durée passera de 15 à 20 ans", a expliqué Jean-François Carenco, avec un différé de remboursement de 14 ans. "A un taux calé sur celui des fonds d'épargne +0,60% ils vont intéresser beaucoup de monde...", conclut-il. Les prêts Gaïa ont déjà mobilisé 310 millions d'euros.
- l'aide aux maires bâtisseurs est aujourd'hui conditionnée à des critères de potentiel fiscal dans les communes. Or, rappelle le Premier ministre, aucune condition n'est exigée dès lors qu'un contrat d'intérêt national est conclu avec l'Etat.
- La procédure intégrée d'immobilier d'entreprise, à l'image de la procédure intégrée pour le logement, permettra de regrouper toutes les démarches et procédures pour simplifier le lancement des projets.
- La redevance pour la création de bureaux, commerces et entrepôts sera modulée dès le 1er janvier 2016. Ses évolutions seront inscrites dans la loi de finances rectificative pour 2015. Les opérations de démolition-reconstruction seront exonérées. Le tarif unique sera maintenu pour les entrepôts dans toute l'Ile-de-France. Les tarifs de bureaux seront modulés selon des zones revues, avec un taux zéro hors zone urbaine.
Autre proposition de Thierry Lajoie, la SPLA-IN est mise à l'étude, et pourrait être adéquate pour la mise en oeuvre de certains contrats d'intérêt national (CIN).
De fait, la panoplie des outils opérationnels s'est étoffée, après ce comité interministériel. L'Etat, pour des objectifs d'intérêt national, pourra "jouer" sur : un grand EPF régional, des Etablissements publics d'aménagement confirmés et d'autres en évolution, une SEMOP (SEM à opération unique d'aménagement) d'Etat, une future Société publique locale d'aménagement d'intérêt national, et un opérateur de référence - le Grand Paris Aménagement.
Une SEMOP à Aulnay-sous-Bois
Le portage de l'aménagement des anciens terrains PSA sera confié à une Sem à opération unique. D'initiative d'Etat ou des collectivités territoriales, elle permettra d'associer des opérateurs privés dans l'investissement - et le retour sur investissement - du projet mixte logement-activités à venir. La loi NOTRe permet à Grand Paris Aménagement d'en prendre l'initiative.
De nouvelles opérations d'intérêt national
Les territoires de Roissy Nord seront couverts par une OIN à vocation stictement économique.
Un projet est en cours de réflexion à Argenteuil, qui couvrirait la Porte Saint-Germain, le Croissant ferré, et le secteur des deux gares.
Une OIN multi-sites est en projet autour d'Evry
L'OIN des Portes Sud du Grand Paris couvrirait, sur la base d'un "projet de territoire" partagé : Bondoufle, Courcouronnes, Corbeil-Essonnes, Evry, Grigny, Fleury-Mérogis, Ris-Orangis. La gouvernance du projet mixte activités économiques/logements pourra être assurée par un GIP associant les représentants de l'Etat, des collectivités territoriales et des personnes morales concernées par les projets.
Une OIN autour de Campus Grand Parc à Villejuif
L'opération d'aménagement en cours est portée par la Sadev94, pour la communauté d'agglomération Val de Bièvre. Un Contrat d'intérêt national devrait être conclu dans la Vallée de la Bièvre, en déclinaison du Contrat de développement territorial préexistant. Le coeur de l'aménagement du territoire, Campus Grand Parc, fera l'objet "en accord avec le maire" de la création d'une OIN mixte (économie/logement), "pour accompagner l'implication très forte de l'Etat".
Trois territoires en discussion pour un contrat d'intérêt national
A Melun Villaroche et à Dammarie-les-Lys au Clos Saint-Louis, la signature d'un contrat d'intérêt national est "envisageable". "Une opération coordonnée est indispensable". L'ambition du seul projet Saint-Louis nécessitera l'appui de l'Etat.
Le Fort d'Aubervilliers, où une ZAC d'initiative d'Etat est portée par Grand Paris Aménagement, est l'objet de discussions en cours avec les élus, sur les modalités d'accompagnement de l'Etat. Ce dernier souhaite y créer une OIN.
Plaine Commune est un cas à part. C'est un des principaux territoires à enjeux dans la métropole. Les élus, réticents à faire de la place à l'Etat dans ce grand périmètre qu'ils administrent seuls, dopés cependant par l'apport de grands équipements - Stade de France, Archives Nationales, Université - pourraient accepter pourtant l'aide qui leur est offerte. Mais ce sera au prix de négociations serrées.
Un contrat d'intérêt national va être conclu, qui pourrait être le prélude d'une OIN. Notamment, si le site de pleyel est retenu pour accueillir le village olympique d'une candidature aux JO, le site deviendrait à l'évidence d'intérêt national. En tout cas, la question du financement du pont de Pleyel sur les voies ferrées rentrera dans un accord plus large. Les discussions avancent.
Sept territoires d'intérêt national
La perspective d'une opération d'intérêt national ne s'est pas concrétisée partout, après la séquence de concertation avec les élus que vient de conduire le préfet. Dans sept endroits, c'est un contrat d'intérêt national qui est en discussion.
Les franges de la Plaine de Montesson (Carrières-sur-Seine, Montesson, Sartrouville). L'Etat souhaite contractualiser avec les collectivités et la profession agricole, pour définir les limites de la plaine agricole "de manière pérenne", tout epermettant la construction de logements. "Il n'est pas nécessaire d'avoir ici un opérateur unique", précise-t-on à Matignon.
Les abords des gares du Transilien du Sud Yvelines : Rambouillet, Coignières, Les Essarts-le-Roi, Le Perray-en-Yvelines. Une approche globale sur la ligne doit permettre de dégager un programme cohérent de développement entre les pôles existants aux abords des gares. L'enjeu : concilier urbanisation, patrimoine, préservation des espaces naturels et agricoles et maîtrise des formes urbaines rn limitant la consommation d'espace.
Le site du Panorama : Clamart, Fontenay-aux-Roses, Châtillon. La signature d'un contrat d'intérêt national doit valoriser "le potentiel de développement de logements sur un site traversé par la ligne du tramway T6.
Charenton-le-Pont : la connexion du secteur val-de-marnais avec le projet Bercy-Charenton que développe la Ville de Paris pourrait donner une envergure métropolitaine à une opération aujourd'hui parisienne. L'appui de l'Etat permettrait un développement coordonné, à travers un contrat d'intérêt national.
Canal de l'Ourcq : le grand territoire que traverse le canal voit éclore les projets de ZAC - chaque commune a la sienne - sans réelle coordination ni recherche de cohérence entre les programmes. Un CIN transversal le permettrait.
Franges de la forêt de Pierrelaye : Pierrelaye, Herblay, Saint-Ouen l'Aumône, Bessancourt. Les communes bordent les lisières de la future grande forêt du Grand Paris. L'enjeu d'y construire du logement n'est pas aujourd'hui pris à sa mesure. La conclusion d'un contrat avec l'Etat, la reconnaissance du caractère d'enjeu national du projet, devrait permettre d'atteindre des objectifs à la hauteur.
Une gouvernance globale pour le corridor aéroportuaire : Mitry-Mory, Villepinte, Tremblay-en-France, Roissy, Aulnay-sous-Bois, Gonesse, Le Bourget, Le Blanc-Mesnil, Dugny. Le secteur foisonne de projets, pas tous cohérents les uns avec les autres, pas tous non plus reliés les uns aux autres. Le projet urbain est ici une peu "lâche". "La gouvernance globale et partagée de ce secteur d'avenir est nécessaire", expliquent les services du Premier ministre, pour articuler activités, habitat, transports, espaces publics, équipements et trame verte. Un contrat avec l'Etat devrait donner la cohérence qui fait défaut.
Des Opérations d'intérêt national qui bougent
L'opération d'intérêt national de Paris-Saclay va s'étendre à la ville de Palaiseau, "pour couvrir les développements possibles du quartier Camille-Claudel". "Cette extension permettra d'accroître la production de logements aux abords immédiats de la ligne de bus en site propre du Plateau de Saclay, qui reliera trois gares de la ligne 18 du Grand Paris Express, et le pôle d'échange multimodal de Massy-Palaiseau", explique le Premier ministre. Philippe Van de Maele, nouveau président directeur général, doit donner l'impulsion nouvelle qui accompagnera la transformation de l'EPPS en EPAPS à la fin 2015.
L'OIN Seine-Aval - aujourd'hui portée par l'EPAMSA - sera confiée à l'horizon 2020 à la future communauté urbaine du Mantois souhaitée par le président du département des Yvelines, Pierre Bédier. "Nous avons passé un accord avec lui pour ce transfert de pouvoir des l'Etat aux élus", confirme le préfet de région. L'actuel établissement public d'aménagement d'Etat sera de fait transformé en un outil à gouvernance locale. Un nouveau directeur, Xavier Hémeury, vient d'être nommé dans cette perspective, après le départ de Didier Bellier-Ganière, nommé directeur de la candidature de Paris à l'organisation des jeux Olympiques.
La Défense : les collectivités locales mises à contribution
L'OIN de la Défense et celle de Seine-Arche, aujourd'hui aménagées par un seul établissement public, pourraient bien évoluer dans l'avenir - en tout cas leur portage. En effet, "il y a urgence à La Défense, il faut aller vite", affirme avec force le Premier ministre. La co-existence de deux établissements publics (EPADESA et DeFacto) devient intenable, considère désormais l'Etat. Les utilisateurs doivent être présents et contribuer à l'entretien.
Notamment, les collectivités devraient être mises à contribution, pour rendre viable le modèle économique - elles péseraient d'un poids prépondérant dans la gouvernance, contrebalancé par un commissaire du gouvernement doté d'un droit de veto. Une mission de préfiguration va être confiée, sans doute à Hugues Parant, actuel directeur général de l'EPADESA, pour préparer la fusion de son établissement avec DeFacto le 1er janvier 2017.
Les principales ressources générées par le quartier d'affaires profitent en effet avant tout aux deux communes de Puteaux et Courbevoie. La seule tour Majunga - dernière livrée - rapportera à Puteaux 170 euros par mètre carré de produit fiscal par an. L'Etat compte bien qu'une partie soit réinvestie sur le site.
Deux nouvelles ORCOD en préparation
Outre l'Opération de requalification de copropriétés dégradées de Clichy-Montfermeil (créée par décret en Conseil d'Etat), et celle de Grigny en Essonne (en cours d'étude par l'EPFIF), deux nouvelles ORCOD ont été décidées et vont être confiées à l'EPFIF : l'une à Argenteuil, dans les Hauts-de-Seine, et une autre au Val-Fourré dans les Yvelines. L'EPFIF choisira son opérateur. "Il n'est pas certain que Grand Paris Aménagement, opérateur à Clichy-Montfermeil, puisse prendre en charge les quatre", précise Jean-François Carenco. Rémi Cambau
EVOLUTION DE GRAND PARIS AMENAGEMENT
Le nouveau GPA va se rapprocher de l'EPA Plaine de france et de l'EPA ORSA pour achever la fusion d'ici au 1er janvier 2017. "Les discussions sont en cours avec les élus concernés", a expliqué le Premier ministre. Mais "les chemins du regroupement ne seront pas les mêmes dans les deux territoires", a précisé le préfet de région. S'il peut y avoir fusion-absorption avec Plaine de France, en revanche, dans le Val-de-Marne, on se dirigerait plutôt vers la constitution d'une gouvernance spécifique "val-de-marnaise", avec regroupement des moyens opérationnels : un seul directeur général commun GPA-EPA ORSA, une seule équipe, mais un conseil d'administration distinct de celui de GPA, un peu à la façon de la dualité EPAMarne/EPAFrance à Marne-la-Vallée.
Manuel Valls doit formaliser les termes d'une proposition dans ce sens à Christian Favier, président du département.