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27 janvier 2022

Mathieu Hanotin maire de Saint-Denis veut "rééquilibrer" la ville

"Saint-Denis compte seulement 6% de CSP+", déplore le maire élu en 2020 à la tête de ce qui fut un fief du parti communiste depuis 1920. Aujourd'hui, pour Mathieu Hanotin, l'un des handicaps de la ville est d'être vue comme une concentration de pauvreté. Plutôt que "d'harmonie", thème de sa campagne électorale perdue en 2014, il préfère se donner comme objectif "l'équilibre". Pour y parvenir, il veut faire de sa commune "un territoire de destination" à l'échelle métropolitaine et internationale, et mettre l'aménagement au service de l'économie locale : moins de bureaux, plus d'emplois de services dans l'hôtellerie, la restauration, le loisir et la culture, une reconquête de l'espace public intégrant les questions de sécurité, et des logements pour tous publics. Il était l'invité ce mercredi 27 janvier de la matinale du Club Ville de Demain créé par le CEPS, le Centre d'étude et de prospective stratégique. Jeudi 27 janvier, le conseil municipal a retenu l'agence Base pour "requalifier les usages" du centre-ville.

Mathieu Hanotin, maire de Saint-Denis, président de Plaine Commune
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"L'harmonie, qui avait été le thème de ma campagne électorale en 2014, renvoie à des notions intimes et très personnelles. L'équilibre d'une ville, qui se trouve collectivement, est l'une des conditions pour que chacun trouve l'harmonie." Mathieu Hanotin, dans cette recherche d'équilibre pour Saint-Denis et pour le territoire de Plaine Commune, revendique de "réhabiliter la notion de responsabilité collective et individuelle, à commencer par celles de son maire et de son équipe. 

L'un des handicaps à ses yeux dont la ville doit se défaire, c'est d'être vue comme la ville de tous les problèmes, comme l'archétype de la banlieue, et comme une ville "spécialisée dans l'accueil de la grande pauvreté". Il compte bien, dans le mandat, trouver des solutions, en s'appuyant sur le potentiel d'opportunités qu'il décèle. "Je veux réhabiliter ici le projet républicain", affirme-t-il. Le nouveau maire élu en 2020 compte bien s'appuyer sur les dynamiques apportées par l'organisation des jeux Olympiques, et par l'arrivée de plusieurs lignes du Grand Paris Express, ainsi que sur le lancement du tramway vers Paris.

"Donner envie de rester"

Mathieu Hanotin souhaite équilibrer la composition sociale de sa commune. "Saint-Denis compte seulement 6% de CSP+", regrette-t-il. Son projet c'est d'abord de "d'inciter les dionysiens à rester. "L'un des signes de la réussite sociale des enfants de Saint-Denis - et il y en a ! - c'est de quitter la ville... La ville est attractive pour son foncier et pour l'immobilier, il faut qu'elle le devienne pour ceux qui réussissent."

Les atouts de la ville ? "D'abord son histoire, longue de plus de mille ans, mais aussi sa jeunesse, et son dynamisme, tant en termes de création d'entreprises que de solidarité au quotidien." Mais "l'accumulation des difficultés" reste un des héritages qu'il souhaite dépasser. L'un des leviers du rééquilibrage de la population vers une plus grande diversité, et, autant le dire, d'une mixité par le haut, est de "redevenir un territoire constructeur". 

Fusionner développement économique et aménagement

Construire est une chose, mais Mathieu Hanotin souhaite réorienter fortement les programmes qui seront accueillis dans sa commune. "Le tertiaire, on sait qu'il n'autorise que des transferts d'emplois métropolitains. Pour le territoire de Saint-Denis, cette stratégie a conduit à ce que nos habitants n'aient que des emplois de sécurité ou de ménage... Le service dans le bureau, c'est du service avec peu de valeur ajoutée."

C'est pourquoi le maire veut "renverser la vapeur". "Nous avons décidé de fusionner le développement économique et l'aménagement. Aujourd'hui, l'aménagement de la commune est trop fortement dépendant de la stratégie des acteurs économiques étrangers au territoire."  

Faire de Saint-Denis un territoire de destination

"Quels sont les emplois que nos habitants sont en capacité de prendre ?", demande simplement le maire. Les emplois de service sont les plus proches de leurs compétences. "Notre population est jeune, parle plusieurs langues, l'anglais arrive en deuxième position - avec une présence importante de personnes d'origine indienne. Le PIB local du tourisme est à moins de 5% ici quand il est de plus de 12% pour la région Île-de-France."

Ainsi, la logique de la nouvelle équipe est de créer un territoire de destination, avec des métiers de l'hospitalité de manière globale : restauration, hôtellerie, équipements de loisirs, médiation culturelle. 

Vers un document d'urbanisme plus ouvert à la construction

Ainsi, Mathieu Hanotin va demander aux conseillers de Plaine commune de voter la mise en révision du PLUi dans ce sens - pour un nouveau document à l'horizon 2024. La démarche doit prolonger le choc d'offre diversifiée que vont apporter les jeux Olympiques, avec les logements du village des athlètes, ou ceux du village des médias, dont une deuxième phase post-2024 est déjà programmée à Dugny. Dans le Village olympique, le maire de Saint-Denis souhaite que les prix de sortie des logements soient revus à la hausse pour tirer la composition sociale vers le haut, comme le maire de Saint-Ouen l'avait déjà demandé. Les discussions se poursuivent avec le maire de l'Île Saint-Denis, plus réticent. 

Les projets urbains de Saint-Denis sont ainsi réinterrogés pour répondre à la nouvelle feuille de route. Le secteur Pleyel doit devenir un pôle d'attractivité touristique et de loisirs - la ZAC a été annulée par la cour d'appel de Paris et devra être revue -, cependant la recherche de "la ville intense et attractive" réinterroge les ZAC Confluence et Saulnier (aves la Métropole du Grand Paris dans cette dernière). 

"Notre objectif est d'organiser une mixité fonctionnelle beaucoup plus importante sur le sud de la Plaine, et à Pleyel, plutôt que d'y avoir du bureau, et de construire une ville intense avec des fonctions d'activités de loisir, de culture, de commerce d'envergure métropolitaine." Pour le maire, la centralité peut être forte autour de la gare Pleyel du Grand Paris Express, et  devenir facteur d'attractivité pour un public aujourd'hui absent, et donc "donner envie de rester" aux habitants. De même, la basilique des Rois de France n'est pas valorisée - c'est tout l'enjeu de "la reconquête des usages du centre-ville". 

La mixité sociale passera par le logement

L'une des mesures fortes prises pour aller vers une montée en gamme de la mixité sociale c'est de favoriser l'accession sociale à la propriété, qui touche des populations par définition moins défavorisées que celles qui bénéficient de logements locatifs très sociaux ou d'insertion. "Le programme local de l'habitat intercommunal avait fixé un objectif de 5% de logements en accession sociale à la propriété, mais on est à peine à 2 ou 3%", relève celui qui est aussi le président de l'EPT.

L'accession sociale passerait désormais par un recours massif au Bail réel solidaire, avec un objectif de livraison de plus de 500 logements en moyenne annuelle. Plaine Commune a, dans ce but, mis en place un Organisme foncier solidaire début 2022 (lire ici). "C'est un bon outil de régulation de la spéculation foncière", ajoute Mathieu Hanotin, et qui permet l'accession à la propriété des plus aisés des occupants du logement social. "Il faut d'abord bien accueillir nos propres habitants, et permettre qu'ils suivent des parcours résidentiels... à Saint-Denis."

De nouveaux urbanistes pour le centre basilique

La construction neuve n'est pas le seul leitmotiv de la nouvelle municipalité. "La lutte contre l'habitat insalubre est une des priorités". Elle est au cœur des programmes de l'Anru, au centre-ville, et dans les cités emblématiques du Franc-Moisin ou d'Allende, qui pourraient "donner naissance à plusieurs quartiers distincts les uns des autres", selon Mathieu Hanotin. Il y faudra selon lui entre 5 et 10 ans.

En effet, le quartier Franc-Moisin n'est pas la priorité du mandat. C'est le cœur de ville de Saint-Denis, avec le soutien de l'Anru et de l'Anah, et l'intervention de la Soreqa pour recycler les immeubles. En mai 2021, le maire expliquait que 6% des résidences privées sont jugées "potentiellement indignes" sur le territoire de Plaine Commune, chiffre qui grimpe à 20% dans Saint-Denis - dans le centre et dans a plaine. C'est à l'occasion de la signature d'une convention de trois ans avec l'Association Foncière Logement, pour mobiliser le programme Digneo, qui est mis en place par la filiale du 1% (ALG). La mairie convoque tous les outils disponibles pour frapper fort et vite, et d'abord dans le centre-ville.

Le conseil municipal du 27 janvier a désigné l'équipe de maîtrise d'œuvre urbaine globale, et de maîtrise d'œuvre de espaces publics menée par l'agence Base (lire ICI et voir les esquisses). Le conseil municipal a aussi approuvé le premier volet de la convention locale de l'Anru, qui porte 112 millions d'euros.

Action urbaine sur le bâti, sur les espaces publics, et politique de sécurité

Dans l'attente d'apporter de la mixité sociale au Franc-Moisin, "ce qui n'est pas évident". "Dans ces quartiers composés à 100% de logements sociaux, on ne peut pas aujourd'hui faire venir des catégories diverses de population." le projet de ce quartier attend encore d'être finalisé. 

Action urbaine, construction et réhabilitation du centre avec "requalification de ses usages" dont participe aussi l'action en matière de sécurité. La police municipale est passée de 40 à 120 agents, armés, et "le nombre des caméras de surveillance a été multiplié par 5", explique Mathieu Hanotin. 

L'urgence, pour Plaine Commune, ce sont les jeux Olympiques. La transformation du centre doit intervenir en parallèle, pour faire basculer le changement d'image espéré. "Les Jeux vont être évidemment marquants, et ouvrir des opportunités. A nous de savoir les transformer en avantages." Rémi Cambau

 

 

Le Tour des villes organisé par le CEPS et le Club Ville de Demain

Après Les Sables d'Olonne, Roubaix, Biarritz, Bourges, Cannes et Clermont-Ferrand, Nevers et Sceaux, le Tour des villes  s'est arrêté dans l'Hérault début janvier et à Saint-Denis (93) fin janvier 2022. 

Le CEPS et son club Ville de Demain, présidé par Jean-Christophe Fromantin, maire de Neuilly-sur-Seine, ont pris l’initiative de créer le Tour des Villes, en coopération avec le Fonds Indarra et en association avec Cadre de Ville. Le projet a pour vocation de permettre à des maires de villes moyennes d’exprimer leur point de vue, leurs attentes et leurs priorités afin de réfléchir aux solutions d’avenir des territoires français. Dans cette optique, le CEPS organise, chaque mois pendant un an, une session débat auprès d’un maire.
En fin de cycle sera rédigé, suite à ces rencontres, un rapport final qui prendra la forme d’une plateforme de propositions d’attractivité urbaine (les atouts à développer), et de recommandations territoriales (les moyens à mettre en œuvre).

Fondé en 1985, le Centre d’Etude et de Prospective Stratégique est une Organisation internationale non-gouvernementale (OING) qui représente 1000 décideurs  de 50 nationalités différentes et qui est à l’intersection de multiples domaines stratégiques. Officiellement reconnu par le Conseil de l’Europe, la Commission Européenne, l’OCDE, l’Unesco et l’OIF, le CEPS dispose de représentations à Abidjan, Alger, Berlin, Beyrouth, Bruxelles, La Haye, Londres, Rome, Washington.